Togo : I’m a voodoo child

Il suffit de rouler quelques kilomètres à l’est de Lomé  pour entrer dans un autre monde.  Celui de la «région maritime», située entre lac et mer, mangroves et cocotiers. Les villes qu’on y découvre sont profondément ancrées dans la tradition, marquées par la pratique toujours vivace de l’animisme et des rites vaudou. La région littorale fut aussi au cœur du système de la traite négrière qui a sévit jusqu’au XIXe siècle et dont quelques vestiges peuvent être visités.

Traite négrière

En sortant de la capitale, vous longez l’immense port de Lomé. C’est l’un des plus grands d’Afrique de l’Ouest, une véritable plaque tournante de toute la région, la destination finale des immenses camions qui traversent le pays depuis le Burkina. La route court le long de l’océan jusqu’à la première étape, la petite ville d’Agbodrafo, lieu de mémoire de l’esclavage. L’ancien nom de la ville était d’ailleurs Porto Seguro, un nom donné par d’anciens esclaves revenus d’Amérique du sud.

Maison-esclave
Des plaques rappellent la triste mémoire de ce lieu.

La Maison des esclaves est un site classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Dans le sous-sol de ce sinistre lieu était entassés dans des conditions inhumaines des centaines d’esclaves qui attendaient d’être embarqués dans des navires direction les colonies. C’est un lieu très fort car il montre simplement les conditions de détention de ces hommes. Ainsi, les esclaves devaient entrer par deux niches étroites au sol. Ils étaient parqués dans le sous-sol de la maison dans un espace très bas où l’on pouvait à peine se tenir assis.

Maison-des-esclaves-ss
C’est sous ce parquet, aujourd’hui en mauvais état, que les esclaves devaient se tenir.
Maison-esclave-trappe
Ils étaient nourris par cette trappe.

Les négriers vivaient juste au-dessus, séparés des esclaves par un simple parquet. Il ouvrait d’ailleurs une trappe à même la salle principale pour leur donner à manger. Il existe apparemment un autre site de commémoration à Agbodrafo, le puits des enchainés que nous n’avons malheureusement pas vu.

Mon beau fétiche

arbre-fetiche-chevres
Coucou les chèvres. Elles ne s’en rendent sans doute pas compte (qui sait…) mais elles sont située sur un double arbre fétiche consacré aux jumeaux. Les morceaux de tissus accrochés sont des offrandes.
fetiche-deggueu
On ne veut pas savoir avec quoi il s’est douché.

Avant d’aller plus loin dans l’exploration de la région maritime, un petit point religion (oui religion) s’impose. Le vaudou, c’est quoi ? Déjà, cela n’a aucun rapport avec les jeteurs de sorts qui piquent des poupées avec des épingles à l’effigie d’une personne en lui souhaitant plein de mauvaises choses. Le vaudou, c’est une forme d’animisme. Et au Togo comme dans beaucoup d’autres pays du monde, de nombreuses personnes restent profondément animistes même s’ils ont embrassé une autre religion. Il est donc très courant de voir des chrétiens ou des musulmans faire des sacrifices à des fétiches ou se prêter à des rites initiatiques. Les animistes vaudous croient au culte d’un Dieu créateur (Mahou) au-dessous duquel se trouvent d’autres dieux inférieurs qui régissent toute la vie quotidienne, qui protègent mais aussi qui punissent. Il faut donc les honorer via des rituels et des sacrifices sur et autour des fétiches qui les représentent. Il y a des fétiches pour le marché (ci-dessus) qui permettent de faire des bonnes ventes, des fétiches pour avoir des bonnes récoltes, des fétiches pour la chasse, pour les enfants, pour le temps, pour la santé… Un peu pour tous les sujets.

La culture vaudou est particulièrement visible à Togoville. Ce village, qui a donné son nom au pays, est situé de l’autre côté du lac Togo. On peut y accéder par la route ou par pirogue. On vous conseille bien entendu la traversée en pirogue d’Agbodrafo à Togoville qui permet d’apprécier de beaux paysages, de bénéficier d’un peu de brise fraiche et d’aborder le village par l’eau tel des aventuriers des temps modernes.

togo-lac
Comme quoi, marcher sur l’eau, c’est pas si dur sur le lac Togo.
arrivée togoville
Le port de Togoville. Le voile au fond de l’image est causé par l’harmattan, un vent qui vient des terres et qui amène avec lui une immense poussière qui recouvre tout.
fetiche-rue
Oui, les fétiches sont toujours sales. Il faut dire qu’ils servent beaucoup.
petite-chevre-etal
Coucou.
enfants
Les p’tits enfants.

Moderne, Togoville ne l’est pas trop. C’est un petit village emprunt de tradition où l’on peut découvrir à chaque coin de rues fétiches et lieux de cultes vaudou. A noter, Togoville est aussi un lieu sacré pour les chrétiens, depuis l’apparition en 1973 de la Vierge Marie géante sur le lac. Chaque année, un pèlerinage très important y a lieu. Jean-Paul II lui-même y a participé en son temps.

blaise-et-vierge
Le lieu le plus sacré du Togo, Blaise est tout content.
barque-vierge
La pirogue sur laquelle étaient les pêcheurs qui ont vu l’apparition de la Vierge. Elle est aujourd’hui recouverte de ciment (chacun pèlerin piquait un bout de bois pour essayer de ramener un peu de protection divine avec lui), mais on peut toujours en toucher le bois par un petit trou.

Maisons coloniales et entrevues manquées

Vue-aneho
Devant chez le roi d’Aného.

D’autres très beaux villages traditionnels peuvent être visités. Blaise, notre guide, nous a emmené dans son village natal Glidji. Nous avons pu nous promener dans les rues, voir la maison où il est né, observer des calebassiers (les calebasses sont des fruits qui, une fois vidés, servent de récipients) et entendre les traditionnels « Yovo, Yovo bonsoir, ça va bien, merci ». Une comptine que les enfants apprennent et chantent à chaque fois qu’ils voient un Blanc (Yovo). À Glidji, nous devions voir le roi, Foli-Bébé XV, issu d’une famille très respectée et puissante au Togo. Mais rien n’y fera, le roi est en retard.

roi

port-aneho

Comme le premier roi n’était pas là, nous avons essayé de voir un autre roi à Aného, une ancienne capitale coloniale, sans plus de succès. Qu’importe, à Aného il y a aussi une architecture unique au Togo: des maisons coloniales et néo-coloniales, de style dit « brésilien »: elles ont été construites par d’anciens esclaves revenus de ce pays. Il faut tourner un peu dans les rues sableuses donnant sur l’océan pour les découvrir.

eglise-aneho
L’église d’Aného donne sur l’océan Atlantique.
rue-aneho
Pour trouver les palmiers, c’est plus simple.
maison-coloniale-aneho
L’une des demeures d’Aného, à l’architecture si particulière.

En pratique

Dormir :
Nous avons logés à Lomé dans le centre à l’hôtel Côté Sud qui est très bien (chambre au top, cours arborée, bonne cuisine). Nous avons payé 38€ la nuit via Booking. Le patron Ludovic est un français. Il peut donner de nombreux conseils et vous aider à organiser des excursions pour visiter Togoville, Aného et Agbodrafo.
>> Le site de l’hôtel Côté Sud : http://hotel-restaurant-cote-sud.lyl-resto.com/

Excursion :

Chauffeur
Il est indispensable de prendre un chauffeur pour visiter ces lieux, comme souvent en Afrique. Difficile de le faire par soi-même. Nous ne pouvons que vous recommander chaudement Blaise qui s’est plié en 4 pour que nous passions une bonne journée. Il n’est pas vraiment guide dans le sens où il ne peut pas vous donner l’histoire des choses mais dans chacun des lieux où nous nous sommes rendus, se trouvaient déjà d’autres guides (obligatoire mais compétents).
Blaise nous a été recommandé par l’hôtel mais vous pouvez tout à fait le contacter même si vous ne logez pas là. D’autant que ça fera toujours une petite com en moins.
Blaise : +228 96 39 99 97 (What’s app).

De façon générale quand vous négociez une excursion, n’oubliez pas de demander ce qui est inclus dans le prix ou non : voiture, chauffeur, essence, repas du guide, repas du chauffeur, droit d’entrée des excursions…
Le prix de la journée avec Blaise : (voiture + chauffeur + essence) environ 40 000 francs CFA.

Et nous avons payé en plus :
– Maison des esclaves Agbodrafo : 2000 francs CFA/personne
– Pirogue aller-retour : 6000 Francs CFA (Merci Blaise pour la négociation)
– Togoville : 3250 francs CFA/ personne pour le guide

Notre précédente article sur le Togo:

» Comment se passe l’arrivée à Lomé, la capitale du Togo
» Trek dans la forêt de Kpalimé, au Togo

Laisser un commentaire